Le couronnement de Charles III : un événement qui ravive le débat sur les monarchies en Europe

Par Oliver Wodziczko-Galon, Etudiant en 5ème secondaire en Sciences économiques (Notre-Dame des Champs, Uccle)


Ce samedi 6 mai 2023, le Royaume-Uni célébrait le couronnement de Charles III suscitant de nombreuses réactions dans le monde entier et rouvrant le débat sur l’utilité des monarchies dans les pays où elles sont encore présentes. Bien que la plupart de ces États se contentent de cérémonies d’investiture moins médiatisées et plus protocolaires.

Le couronnement de Charles III

Plus de huit mois après la mort de la reine Elizabeth II, le roi Charles III a été officiellement couronné à l’abbaye de Westminster ce 6 mai. Cependant, en réalité, Charles était déjà roi et, en fait, il l’est devenu le lendemain de la mort de sa mère lorsqu’il a été proclamé roi par le Conseil d’accession au palais Saint-James à Londres.

Il est donc logique de se demander si cette cérémonie de couronnement était vraiment nécessaire. Vieille de 1000 ans, elle est une tradition très emblématique. En effet, à une époque où les régents n’héritaient pas du trône de leurs parents, ils devaient d’abord être élus par les pairs. Après cette élection, le roi assistait à une cérémonie justifiant sa nomination auprès des sujets britannique. La cérémonie du couronnement est aussi une cérémonie religieuse très importante. Lors de la célébration le Charles a été oint d’une huile dite sainte. Par cette onction, il est devenu le représentant de Dieu en Angleterre.

Les couronnements sont aussi généralement une célébration populaire pour les Britanniques, ils se rassemblent et célèbrent leur nouveau monarque. Mais cette année, une grande partie de ces derniers, fatigués par la crise du coût de la vie, l’inflation et la crise politique, n’était pas d’humeur à faire la fête. D’autres ont exprimé leur opposition au Roi dans la rue, menant au spectacle surréaliste (et posant question du point de vue de la liberté d’expression), avec des manifestants pacifiques arrêtés en marge du couronnement. Au total, 52 personnes ont été arrêtées sur simple suspicion par la Police, dont un fan royaliste arrêté par erreur alors qu’il voulait simplement assister à la procession du couple régent.

Les dernières monarchies d’Europe

Aujourd’hui en Europe nous avons dix familles royales: les Bernadottes en Suèdes, les Bourbon en Espagne et au Luxembourg, les Grimaldi à Monaco, les Liechtenstein au Liechtenstein, les d’Amsberg au Pays-Bas, les Glücksburg au Danemark et en Norvège, les Windsor au Royaume-Uni et les Saxe-Cobourg en Belgique. Au total on compte sept Royaumes, deux Principautés et un Grand duché. Il y a également deux monarchies non héréditaires, le Vatican qui est une monarchie de droit divin dont le régent est le Pape et Andorre, où règnent deux co-princes, le chef de l’État français, actuellement Emmanuel Macron, et l’évêque d’Urgell.

En Europe nous sommes passés de monarchies absolues aux monarchies constitutionnelles. Au sein de ces dernières le monarque dispose de pouvoir qui sont définis et limités par la constitution et il n’a pas de pouvoir politique sauf au Liechtenstein où il peut proposer des législations. Le pouvoir politique est donc en pratique dévolu à un Premier ministre, qui est le chef du gouvernement, nommé par le monarque sur base du résultat des élections. A noter qu’au Royaume-Uni, le roi est le chef de l’état et garde un rôle important, il est gardé à une neutralité politique mais il conserve des pouvoirs constitutionnels de forme, comme la nomination du gouvernement, l’ouverture et la dissolution du Parlement, et dispose d’un assentiment royal sur les projets de loi. Il nomme également les Pairs à vie sur base de conseils de son premier ministre.

L’unité et la stabilité

Aujourd’hui, il est tout à fait légitime de se poser la question de l’utilité des monarchies. Ces dernières années, les monarchies européennes ont été mises à mal. Depuis toujours, l’argument préféré des royalistes au Royaume-Uni, en Belgique ou encore en Espagne est l’unité et la stabilité. En Espagne, la velléité indépendantiste de la Catalogne il y a quelques années était un affront direct à l’unité de l’Espagne, symbolisée par la figure du roi Felipe VI. En novembre 2017, un sondage réalisé en Flandre a montré que 57% des sondés déclarent vouloir changer la fonction de la monarchie pour la rendre plus protocolaire. Récemment au Royaume-Uni, Alex Salmond, ex premier ministre écossais, a déclaré en direct à la radio que le roi Charles III serait le dernier roi d’Écosse où le sentiment d’indépendance ne cesse de grandir.

La question de l’argent public

Les familles royales européennes sont supportées financièrement par les contribuables, il faut en effet rémunérer tout le personnel, l’entretien des propriétés royales, les voyages, les engagements, etc. Le pays qui dépense le moins pour sa famille royale est le Liechtenstein, en effet la famille royale ne coûte rien au contribuable et se supporte et rémunère seule grâce ses placements et la possession d’une banque privée. Avec 8 millions d’euros de budget, la famille royale espagnole est la deuxième la moins chère. A titre de comparaison, la Belgique dépense près de 41 millions d’euros pour sa famille royale qui est la cinquième la plus chère. Même si ce chiffre paraît élevé, il est loin des 102 millions de livres alloués à la famille royale anglaise.

Nous l’avons établi, toutes les familles royales (hormis celle du Liechtenstein) coûtent cher au contribuable. Mais le régent est une sorte d’ambassadeur permanent pour l’administration et les entreprises de son pays. En Belgique par exemple, lors de ses missions royales à l’étranger le roi voyage avec une délégation formée de dizaines de chefs d’entreprises et de ministres. Ces voyages sont des occasions parfaites pour le renforcement des relations économiques, la promotion d’investissement et l’introduction de nouveaux partenariats commerciaux. Ceci stimule l’innovation et le développement économique et fait rentrer de l’argent dans les caisses de l’État. La famille royale anglaise dispose d’un soft power (un pouvoir d’influence) encore plus fort et respecté partout dans le monde. De plus, son impact économique sur le tourisme en Grande-Bretagne est estimé à plus d’un milliard de livre et sa valeur en tant qu’entreprise est de 67,5 milliards.

Dans l’ensemble, on ne peut nier que les monarchies européennes représentent un coût important pour les contribuables. Elles sont par ailleurs en train de perdre en popularité et ne représentent plus vraiment l’unité. Cependant, il convient de souligner que ces institutions apportent encore de nombreux avantages à l’économie.


Bibliographie

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